Drôle de nuit à Hakata. Réputée pour sa vie nocturne, je m'extirpe de mon demi-sommeil à 1h30 pour voir cela. Pour une ville de "province", le spectacle est étonnant. Dès la sortie de mon
ryokan (auberge japonaise, avec tatamis et futon), je vois au premier étage d'un immeuble un salon de coiffure avec une grande baie vitrée, tous néons allumés. Comme à Hong Kong, en raison du manque d'espace, beaucoup de commerces sont situés en étage, ce qui est bien déconcertant pour des esprits européens. Je me frotte les yeux, dormirais-je debout ? Je n'ai pas la berlue, je distingue même deux coiffeurs à l'oeuvre.
C'est un jour de semaine, et pourtant la nuit est animée. On voit des bandes d'employés japonais en costume s'attabler, éméchés, à des restaurants improvisés sur les trottoirs. Les rabatteurs de
strip clubs tentent de les cueillir.
Les employés japonais me rappellent furieusement
Matrix : ils sont à 90% habillés en noir, hommes et femmes. Les exilés de La Défense ont par comparaison plus de fantaisie !
Ces restaurants de rue paraissent bien décalés dans ce Japon moderne, ils me rappellent Pékin ou Saigon (Hochiminh-Ville). Le petit plus de Hakata est cet attendrissant contraste entre "costards-cravates" et punks côte à côte aspirant bruyamment des
ramen (nouilles) à 3,5 euros le bol. Je me demande si je ne suis pas dans la Quatrième Dimension.
Je rentre. Il est 3h30. Le salon de coiffure que j'avais vu à l'aller est toujours allumé, et les coiffeurs toujours en action...
Quelques heures de sommeil. Je me lance dans l'exploration de la ville, sous un beau soleil. Le plus grand Bouddha en bois du Japon est ma première étape. Mon périple nippon a débuté il y a deux semaines, j'ai déjà vu beaucoup de temples et de Bouddhas, à Tokyo, Kamakura et Nikko. Je crains d'être déçu, et de faire le "blasé" malgré moi.
Promis, juré... la photo n'a pas été retouchée !C'est une belle surprise. Le Bouddha est rayonnant. Ayant plutôt vu jusqu'à présent des Bouddhas en pierre ou en métal, le bois donne incontestablement une texture, un aspect chatoyant très agréable. La lumière du matin filtre doucement. Ce genre de choc esthétique permet de mieux comprendre l'émotion des croyants...
Intermède à Canal City,
un centre commercial organisé autour d'un canal intérieur
Dernier étage de Canal City,
entièrement occupé par des restaurants de ramen
(nouilles japonaises inspirées de Chine) :
quelle foule pour des nouilles !
Et voilà l'objet du désirC'est mon jour de chance : il fait beau, et sans l'avoir anticipé, le
Hakata Dontaku Matsuri se tient aujourd'hui. Je ne comprends pas très bien le sens de ce festival, le
Lonely Planet n'est guère disert là dessus, mais on voit beaucoup d'enfants dans des costumes traditionnels gambader dans les rues.




Les spectacles à travers la ville, dans les temples et les rues sont très variés, et sont à l'image de ce Japon à double visage, l'un embrassant fougueusement la modernité occidentale, et l'autre attaché à ses traditions. Cette double personnalité semble cohabiter harmonieusement au sein du pays, du moins pour l'observateur européen... La force d'une culture est-elle dans sa capacité à assimiler à sa "sauce" ce qui lui est "étranger", ou bien dans la fermeture de ses frontières ? Le Japon a balancé au cours de son histoire entre ces deux réponses, alternant confinement total et ouverture effrénée...







